Le mois dernier je vous ai présenté la Vie De Merde Agile d’un Scrum Master qui faisait face à une idée aussi surprenante que créative d’un développeur intitulée “Vie De Merde Agile : on doit allonger le sprint“. Ce mois-ci, la situation d’inverse ! Parole aux développeurs !
Attachez vos tuques et préparez-vous à rire (ou à pleurer) devant cette nouvelle Vie de Merde Agile !
Merci à A., développeur, qui m’a partagé sur Linkedin sa Vie De Merde Agile…
Il est essentiel de préciser que, pour des raisons de confidentialité, ni la personne concernée ni le client impliqué dans cette situation ne seront mentionnés. Je tiens à exprimer ma gratitude à ceux qui partagent avec moi leurs expériences issues de l’univers Agile en complétant ce formulaire : VDM Agile. Je suis ravie de pouvoir les transformer en articles. L’objectif n’est pas de critiquer les organisations, les Scrum Masters, les Product Owners, les développeurs ou les gestionnaires, mais plutôt de tirer des leçons des défis rencontrés dans cet environnement, le tout avec une pointe d’humour! ❤️
Vie de merde Agile : Je ne vous écoute pas pour tester votre autonomie
Aujourd’hui, je suis développeur dans une équipe agile. Pendant notre planning, la Product Owner mène la cérémonie comme une pro, alors que notre Scrum Master est absorbé par son téléphone depuis 45 minutes sans un mot de sa part. La Product Owner, visiblement irritée par cette nouvelle démonstration d’inutilité professionnelle, finit par lui dire : “Ça va ? On ne te dérange pas trop ?” Et là, tout fier, il répond : “Non, je teste votre niveau d’autonomie.” Résultat ? On a passé le test, quant à notre Scrum Master, il a passé un niveau sur Candy Crush. Vie De Merde Agile.
Vie de merde Agile, ma réaction
Ma première réaction en tant que développeur ? La résignation. Franchement, je ne suis même plus surpris. Encore une fois, j’ai eu la confirmation de ce que je pensais depuis un moment : notre Scrum Master est une plante verte, il ne sert à rien. Et d’ailleurs, si on veut vraiment faire des économies en entreprise, je propose qu’on vire tous les Scrum Masters. Avec le budget que l’on va récupérer, on pourra enfin réaliser une demande que l’on nous refuse toujours pour « raisons budgétaires ». Quel gâchis !
En y repensant à froid, j’ai un peu honte de moi parce qu’à l’inverse de la Product Owner, j’ai été passif et je n’ai pas eu le courage d’intervenir. Par contre, je réponds toujours présent pour le critiquer dans son dos avec les autres développeurs durant nos pauses cafés! Si on fait abstraction de mon manque de courage, est-ce vraiment à moi d’intervenir? Après tout, si l’organisation l’a recruté c’est à elle d’assumer son choix!
D’ailleurs, de l’énergie pour son organisation, notre Scrum Master en a beaucoup. On dirait qu’il met plus d’énergie à sourire et à serrer des mains qu’à réellement faire avancer la transformation agile. Il va là où il y a de la lumière pour briller, et il semble que la lumière est plus puissante près des boss que près des développeurs !
Et parlons de sa punchline : “Je vous testais pour voir si vous étiez autonomes”. C’est moi ou il nous prend pour des enfants ? Je me suis senti humilié ! Test d’autonomie ? C’est quoi, la prochaine étape ? Il va nous filer des gommettes de motivation ? On est des adultes professionnels ! Enfin, sauf lui, visiblement.
Je commence à me demander où il a appris cette technique de coaching. En suivant un tutoriel sur TikTok ? Une astuce trouvée au dos d’une boîte de céréales ? Vu son air juvénile, je le soupçonne de commencer ses journées avec un bon gros bol de Chocapic avant de venir tester notre “autonomie”.
On devrait peut-être organiser une rétrospective spécialement pour notre Scrum Master. Le thème serait : “Comment travailler… au travail ?”
Bref, on a passé son test d’autonomie avec succès… et avec une pointe d’amertume. Vie De Merde Agile.
Vie de merde Agile, analyse de la situation
Nous avons beaucoup d’informations et d’opportunités d’apprentissage dans cette anecdote ! Décortiquons-la ensemble !
1. L’impuissance acquise ou quand la passivité devient la norme
L’impuissance acquise est un phénomène psychologique qui se produit lorsqu’une personne, confrontée à des situations répétées où elle ne peut pas agir ou changer les choses, finit par croire que toute action est inutile. Elle cesse d’essayer, même lorsque des solutions sont à portée de main.
Dans cette histoire, le développeur ressent de la résignation dès le début. Il pense que la situation est irrémédiable, que son Scrum Master est inutile, et qu’il n’y a rien qu’il puisse faire pour améliorer la situation. Malheureusement il a tort! Il peut changer les choses!
La clé est d’agir plutôt que de subir. Si l’on constate une répétition de comportements inadaptés (comme l’inaction du Scrum Master), plusieurs options s’offrent à vous comme en parler directement avec le Scrum Master, en parler en groupe durant la rétrospective, ou encore passer par un intermédiaire comme un gestionnaire ou un autre collègue si nous ne savons pas comment initier la discussion.
La passivité ne doit pas devenir une norme. Agir de manière constructive, proposer des solutions et ne pas hésiter à rappeler l’importance des rôles agiles permet de briser cette impuissance acquise.
2. L’incompréhension du rôle du Scrum Master
Le rôle du Scrum Master est souvent mal compris. Il ne s’agit pas seulement d’être un facilitateur de réunions ou un gestionnaire de tâches, mais d’être un coach pour l’équipe, d’éliminer les obstacles et de s’assurer que l’équipe agile fonctionne de manière optimale.
Dans cette histoire, le Scrum Master, scotché à son téléphone pendant 45 minutes, ne semble pas comprendre que son rôle va au-delà de la simple observation. Il n’intervient pas, n’apporte pas de valeur, et finit par justifier son inaction sous couvert d’un « test d’autonomie ».
Un bon Scrum Master est un leader-serviteur. Il doit être à l’écoute, intervenir pour faciliter les discussions, encourager l’auto-organisation tout en guidant subtilement l’équipe.
3. L’infantilisation
L’infantilisation se produit lorsqu’un leader traite ses collègues comme des enfants, en les testant, en leur donnant des tâches simplifiées ou en remettant en question leur capacité à prendre des décisions par eux-mêmes.
Dans cette histoire, le Scrum Master explique qu’il “testait” l’équipe pour vérifier son autonomie. Cette attitude réduit les développeurs à des enfants en apprentissage, ce qui peut être démotivant et humiliant pour des professionnels expérimentés.
L’autonomie se construit par la confiance, pas par le contrôle déguisé en tests. Un Scrum Master doit encourager l’autonomie en laissant l’équipe s’auto-organiser, tout en étant présent pour les soutenir et non pour les juger. La confiance et le respect des compétences des membres de l’équipe sont essentiels pour renforcer leur motivation et leur engagement.
4. La légitimité à dénoncer un collègue
Dans un environnement agile, chacun doit être responsable de son travail et de son rôle. Mais quand un collègue semble ne pas faire son travail (comme ici avec le Scrum Master), la question se pose : suis-je légitime à le signaler ?
Dans cette histoire, le développeur est passif, mais il se demande si c’est à lui de réagir. Il ressent un malaise face à l’inaction du Scrum Master, mais n’ose pas le dénoncer ou le confronter directement.
Si un membre de l’équipe, quel que soit son rôle, ne remplit pas ses responsabilités, il est important d’aborder le sujet en équipe, lors des rétrospectives ou d’oser aborder le sujet avec un gestionnaire. L’approche doit être constructive, centrée sur la recherche de solutions. Le but n’est pas de « dénoncer » mais de s’assurer que tout le monde contribue efficacement à la réussite collective.
5. Le “bitchage” et la mauvaise utilisation du réseau informel
Dans de nombreuses organisations, les discussions informelles et le “bitchage” (critiques non constructives dans les coulisses) peuvent se substituer à des échanges francs et ouverts, ce qui nuit à la cohésion d’équipe et à la transparence.
Dans cette histoire, le développeur rumine sur le comportement du Scrum Master, mais préfère se taire et partager ses frustrations avec d’autres collègues en aparté, plutôt que d’aborder le problème directement.
Le feedback direct et bienveillant est la meilleure manière de résoudre les conflits et d’améliorer la collaboration. Plutôt que de se plaindre dans l’ombre, il est préférable d’ouvrir une discussion honnête avec l’équipe ou lors des rétrospectives. Les conversations informelles peuvent être utiles pour décompresser, mais elles ne doivent pas devenir une échappatoire aux problèmes réels.
Vie de merde Agile, solution à explorer
Je vous propose une idée un peu folle : coacher votre Scrum Master ! Oui, oui, vous avez bien lu. Il s’agirait de lancer une discussion de groupe avec l’équipe et le Scrum Master, histoire de clarifier ce que chacun attend de l’autre. Ensuite, on définit tous ensemble un objectif de transformation commun, auquel tout le monde s’engage à contribuer dans un délai donné (pas trop long, on n’a pas une éternité non plus !).
Et pour ne pas perdre le nord, on mesure nos progrès avec des indicateurs de succès bien choisis. Parce que bon, si on ne sait pas où on va, autant éviter de tourner en rond. Sans oublier l’élaboration d’un plan d’action. Parce qu’une bonne intention, c’est bien, mais avec des actions concrètes, c’est mieux !
Pour conclure, un Scrum Master qui se tourne les pouces en pleine cérémonie, ou qui est aussi présent que le silence dans un concert de heavy metal, on connaît tous ça, non ? Pas de panique, il y a des bons et des mauvais éléments dans toutes les entreprises. Mais évitez les généralités et de dégainez plutôt l’outil magique mais parfois un peu rouillé : le feedback constructif !
Et surtout, n’hésitez pas à partager anonymement vos anecdotes de Vie de Merde Agile dans les commentaires ou en utilisant ce formulaire. Je me ferai un plaisir de les transformer en articles. Non seulement on en rira ensemble, mais en plus on creusera pour trouver des pistes de réflexion et des solutions !